22 de febrer del 2017

Bras de fer. Éditorial. Par Marie-Louise Roubaud

Bras de fer
L'édito du jour - Éditorial -

21.02.2017
Ce n'est pas d'aujourd'hui que l'Espagne et l'Europe découvrent que la Catalogne rêve de sécession. Le goût de l'indépendance est dans l'ADN des Catalans. Depuis des lustres. Depuis la Reconquista (la  Reconquête) achevée sous l'égide de la Castille et de l'Aragon l'année même où Christophe Colomb découvrait l'Amérique. Ne jamais oublier non plus d'associer à ce tropisme la devise « Sempre endavant, mai morirem » – «Toujours en avant, jamais nous ne mourrons » – qui en dit long sur la fameuse ténacité catalane à se désolidariser de la péninsule. Le franquisme, en reprenant possession de ces terres rebelles au terme de la guerre civile, ne s'y était pas trompé. Il avait interdit toute expression du sentiment nationaliste, qui a couvé comme le feu sous la cendre, jusqu'à la mort du dictateur et le retour de la démocratie.

Malgré le rétablissement de l'emblématique Généralitat, les indépendantistes sont de retour, vent debout, contre la monarchie des Bourbon et contre un gouvernement conservateur qu'ils jugent à l'aune de leur détestation du pouvoir central.
Aujourd'hui en Espagne, de Barcelone à Valence en passant par les Baléares, plus de six millions de citoyens parlent la langue de Salvador Espriu, le poète qui affirmait : « Les hommes ne peuvent être s'ils ne sont pas libres. » Être ou ne pas être… solidaires ? La question mobilise en profondeur au-delà des frontières de la Catalogne… D'autant que les revendications séparatistes se doublent de revendications républicaines. La vieille cité comtale de Barcelone est la tête de pont d'un mouvement qui s'invite aussi dans la province profonde qui affiche ouvertement la fameuse « senyera », le drapeau catalan, rouge et or, estampillé de l'étoile de la dissidence et qui porte le beau nom de « l'estelada »l'étoilée.

La confrontation avec l'État espagnol a culminé en novembre 2014, par une consultation interdite par Madrid, mais menée tambour battant par les autorités catalanes en place, qui avaient mobilisé ce jour-là deux millions d'électeurs dont 80 % s'étaient déclarés favorables à l'émancipation.

Ce sont ces mêmes électeurs qui se retrouvent aujourd'hui dans la rue, et au banc des accusés aux côtés de leur ancien Président Artur Mas dont le procès vient de s'ouvrir à Barcelone et qui plaide non coupable, puisqu'il dit s'en être tenu au mandat de son Parlement. La date de cette consultation symbolique qui a mis le feu aux poudres était elle-même hautement symbolique puisque toute proche de « La Diada », la fête nationale du 11 septembre qui rappelle depuis trois siècles la prise de Barcelone par la dynastie des Bourbon. Mais la guerre civique, elle, n'est pas finie puisque le nouveau Président de la Généralitat prévoit une nouvelle convocation publique sur le même thème.

La partie de bras de fer est incertaine à la fois pour le Parti populaire (droite) au pouvoir qui met son autorité en danger et pour les Catalans séparatistes qui ne sont pas assurés d'une majorité chez eux.
Marie-Louise Roubaud
ladepeche.fr