13 de febrer del 2025

Martin Aurell est mort. Festival de la biographie de Nîmes, il avait reçu le prix du « Point » pour son «Aliénor d’Aquitaine », le 25 janvier 25



 

Prix de la biographie du « Point », est mort

Le 25 janvier, au Festival de la biographie de Nîmes, il avait reçu le prix du « Point » pour son « Aliénor d’Aquitaine ». Portrait d’un des grands médiévistes français.

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L'un des principaux médiévistes français, directeur du Centre d'études supérieures de civilisation médiévale de l'université de Poitiers, d'où il avait rédigé en voisin cette biographie d'une reine enterrée à l'abbaye de Fontevraud, avait jonglé devant nous avec les dates, les lieux, les parentèles de cette femme hors norme morte à 80 ans. Il avait surtout su la replacer dans l'esprit de son temps, le XIIe siècle, ce Moyen Âge trop méconnu dont il avait redressé quelques idées reçues dans un précédent ouvrage. Rendre accessible l'érudition, ne pas céder à la facilité pour évoquer une période aujourd'hui difficile à saisir, était son principal souci.

Enquêteur médiéviste

De son léger accent catalan, qui témoignait d'une naissance en Espagne en 1958, il avait aussi déconstruit la légende noire de cette reine accusée de traîtrise, de frivolité, d'être la « Marie-Antoinette du Moyen Âge », d'avoir même à elle seule, par sa désunion affichée avec le roi de France Louis VII suivie d'un remariage avec Henri Plantagenêt, futur roi d'Angleterre, posé les jalons de la future guerre de Cent Ans. Sur les quelques points litigieux, il avait répondu sans détour, précisément, tel un enquêteur ravi d'avoir fait enfin la lumière sur des sujets débattus depuis des siècles

Sans verser dans la doxa féministe qui revisite les siècles passés, il avait su dans ses pages et dans ses réponses donner chair au caractère bien trempé et aux qualités d'une femme de tête qui avait navigué et résisté à bien des embûches dans un monde d'hommes. Cet ouvrage prolongeait la somme qu'il avait rédigée il y a vingt ans sur cet empire étonnant et délicat à comprendre, l'empire Plantagenêt, l'empire des Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre, à cheval sur la France et l'Angleterre, le plus grand empire de l'Occident du XIIe siècle, qui fut seulement défait au siècle suivant sous le règne capétien de Philippe Auguste.

Historien de la chevalerie

Mais Martin Aurell aura été aussi le grand historien de la chevalerie. Connaisseur hors pair des romans arthuriens, il leur avait consacré une anthologie avec Michel Pastoureau. De cette classe de chevaliers il avait décrit les usages, les codes, l'univers spirituel et intellectuel, assez original pour dédier tout un livre à l'épée, contrebalancé par un autre qui dressait des portraits de chevaliers lettrés, l'une, la lame, n'étant pas incompatible avec l'autre, l'écrit.

À cet égard, son ouvrage le plus novateur et surprenant aura été une étude de l'opposition de certains chevaliers aux premières croisades entreprises. Le nombre de travaux collectifs qu'il aura dirigés sur le Moyen Âge témoigne du vide qu'il laisse dans une discipline en souffrance, qui peine déjà à trouver des vocations. Le propre du vrai historien est de toujours remettre son ouvrage sur le métier. Alors que nous discutions après le débat consacré à son livre, Prix de la biographie du Point, il nous avouait rédiger une grande synthèse sur les… chevaliers.